La carafe de la discorde

film carafeVous l’avez peut être vu dans les médias, je lance aujourd’hui une nouvelle campagne sur le tri et le recyclage, cette fois centrée sur la collecte du verre. Dans les arrondissements où il y a encore un fort potentiel de progression du tonnage collecté, la Ville invite les ParisienNEs à rapporter leurs bouteilles sur leur marché. Un sac de tri et une carafe en verre recyclé leur seront offerts en échange. Retrouvez les détails, et une vidéo sur la fabrication de ces carafes sur dechets.paris.fr.

Au-delà de son aspect ludique, cette opération se veut exemplaire. D’abord par son caractère pédagogique : elle met en présence les deux bouts de la chaîne du recyclage : d’un coté le verre usagé et de l’autre le nouvel objet entièrement réalisé en verre collecté à Paris puis recyclé. Mais elle est bien plus que ça, car elle met en cohérence différentes politiques environnementales de la Ville de Paris : le recyclage, la prévention des déchets et la promotion de l’eau du robinet.

recyclage carafeCe qui était une classique opération de promotion du recyclage est ainsi devenue, aux yeux des industriels de l’eau en plastique et du lobby de l’emballage, une insupportable nouvelle provocation de la Ville de Paris. Vous le savez, la carafe distribuée avait en effet été créée par la société de production des eaux de Paris, sous l’impulsion de sa présidente, Anne Le Strat, pour promouvoir l’eau du robinet.

pointvertAdelphe (filiale d’Eco-Emballages), la société agréée par le ministère de l’environnement pour collecter la (trop petite) pollutaxe sur les emballages (le « point vert ») a ainsi refusé de co-financer l’opération, alors que la promotion du recyclage et de la prévention des déchets fait partie des missions d’intérêt général assignées par leur agrément.

J’ai donc saisi le ministère de l’environnement pour dénoncer ce manquement et je fais étudier par la Ville les développements contentieux que pourrait avoir cette affaire.

C’est là une nouvelle illustration de la carence du système français du recyclage qui fait la part belle aux industriels de l’emballage. Comme je l’écrivais dans un point de vue paru dans la Tribune en 2004, confier la gestion du « point Vert » à des sociétés dont les actionnaires sont les industriels producteurs de déchets est une aberration. Paris bénéficie en effet d’une taille qui lui permet de passer outre le véto de la société agréée. Beaucoup d’autres collectivités n’ont pas cette possibilité et doivent se plier aux desideratas du lobby de l’emballage s’ils veulent pouvoir financer leur communication sur le tri.

Comme sur l’affaire Cristaline[1], on voit que sous couvert de discours écolos, les industriels défendent d’abord leurs intérêts et n’hésitent pas à s’opposer aux politiques publiques locales résolument écologistes.

C’est, je crois, la noblesse des Verts : au-delà des « pactes », poser des actes écologiques.


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