Roland Garros à Paris : le miroir aux alouettes !

Le Maire de Paris défend avec acharnement le projet d’extension de Roland Garros sur le site classé des Serres d’Auteuil malgré les critiques chaque jour plus nombreuses.

Il aurait même fait réaliser une « note blanche » soulignant les faiblesses juridiques du projet concurrent de Versailles.

Pourtant s’il y a un projet fragile au plan juridique, c’est bien celui de Paris

En effet, l’extension de Roland Garros est prévue sur un site classé.

Cela implique un avis d’un certain nombre d’organismes dont la commission départementale et la commission supérieure des sites.

Or cette dernière a déjà émis un avis de principe sur les sites classés de Paris le 19 juin 2008. Cet avis est repris dans le « rapport Brodovitch » concernant les bois de Boulogne et Vincennes : « les sites classés de Paris, ne peuvent être considérés comme des réserves foncières pouvant accueillir les équipements sportifs nécessaires à la ville ou à l’Etat ».

Avec un tel avis il est certain que les chances d’obtenir un avis favorable sont quasiment nulles. D’ailleurs la Direction de l’urbanisme de la Ville de Paris ne s’y est pas trompée puisque dans un mail adressé au cabinet du Maire, elle propose de tenter une opération de lobbying auprès de M. Brodovitch et des autres membres de la Commission supérieure.

Un autre point de faiblesse tient à l’article L581-4 du Code de l’environnement qui interdit toute publicité dans un site classé. Les sponsors habituels de Roland Garros en seraient donc pour leur frais, leur marque ne pouvant s’afficher sur le nouveau court, pas plus que sur les maillots des joueurs ou des ramasseurs de balles.

Il existe aussi une disposition rappelée par le Conseil d’Etat selon laquelle un site classé ne peut recevoir une destination autre que celle ayant servi de base à son classement. Les Serres d’Auteuil ont été classées pour leur patrimoine architectural, végétal et paysager. Il n’est donc pas possible de leur donner une destination sportive sauf à demander le déclassement, procédure rarissime et particulièrement complexe.

L’article L2125-3 du Code général de la propriété des personnes publiques, fixe les conditions des redevances payées par les occupants du domaine public. La jurisprudence considère qu’une redevance trop faible n’est pas conforme à la loi. Or la chambre régionale des comptes et l’Inspection générale de la Ville de Paris ont déjà indiqué de façon très argumentée que l’actuelle redevance était trop faible et ont proposé un montant plus près de 20 millions d’euros que du 1,5 million actuel et des 3 millions proposés.

Mais surtout il y a le respect de la parole donnée.

Lors de la dernière extension de Roland Garros (en 1992), la Commission départementale des sites à été logiquement saisie du dossier. Plusieurs intervenants ont protesté contre les extensions successives puisque de 1978 à 1992 Roland Garros s’est agrandi 7 fois !

Prudents, les représentants de Boulogne et d’associations ont demandé un engagement à la FFT d’une part et à la Ville de Paris d’autre part selon lequel cette extension serait la dernière et qu’en aucun cas il ne serait possible de s’étendre sur les Serres d’Auteuil et le square des Poètes. La FFT et la Ville de Paris se sont engagées solennellement en ce sens. Le Maire de Paris et le Président de la Fédération française de tennis sont donc liés par cet engagement.

D’autant que lors de la Commission d’enquête publique liée au permis de construire, la même demande a été formulée et le Commissaire enquêteur a donné un avis favorable sous réserve que ces engagements soient tenus.

Revenir sur ces engagement serait donc un parjure et porterait un tort considérable à la Ville de Paris.

Tout converge donc pour considérer que le projet de Paris n’a aucune chance ou presque de passer les obstacles juridiques qui se dressent devant lui. Les recours inévitables allongeraient les délais dans des proportions considérables et auraient pour effet de renchérir le projet dans un premier temps et probablement de lui porter un coup fatal ensuite.

La raison voudrait que le Maire de Paris qui en a fait une affaire personnelle, se rende à l’évidence qu’il n’y a que deux solutions :

  • Le maintien sur le site actuel dans le périmètre existant,
  • L’extension sur un autre site.

La FFT sera sans doute plus prudente et ne prendra pas le risque de s’aventurer sur un tel terrain d’aventures judiciaires, c’est ce qu’il faut espérer.

5 réflexions au sujet de « Roland Garros à Paris : le miroir aux alouettes ! »

  1. C’est assez incroyable cette histoire de publicité, car le cas est encore plus flagrant pour Versailles, entièrement dans un site classé. Quel modèle économique pour le tournoi dans ce cas ? Comment les concepteurs des projets ont pu laisser passer ce point ?

  2. Interressant et pertinant, il serait bon de rappeler que de toute façon si Roland Garros reste à Paris, d’ici à 5 ans ce ne sera plus un tournoi majeur, car sur un site si petit, il ne tiendra pas la route économiquement.
    A Noter le Site de Versailles n’est pas sur des terrains classés, autrement leur état serait autres qu’aujourd’hui. Il est simplement à proximité de. …

  3. Sacrée contradiction : Delanoë, qui parle du Grand Paris avec des trémolos dans la voix, refuse par ailleurs de concevoir qu’un équipement sportif comme Roland-Garros puisse se développer au-delà du périphérique, à Marne-la-Vallée par exemple.

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