Le débat s’aiguise sur la création d’une intercommunalité au sein de l’agglomération francilienne et semble de plus en plus se résumer, au plan national à une équation à deux inconnues : comment semer la zizanie entre Paris et la Région d’une part, et comment échapper à toute forme de solidarité financière d’autre part. La conférence de presse de Mme de Panafieu et de M. Karoutchi le 21 janvier 08 illustre à dessein ce propos : Envisager la création d’un « syndicat mixte ouvert » démontre à quel point les deux candidats (l’une à la Mairie de Paris et l’autre à la Région) sont dans une impasse conceptuelle et sans projet sérieux.
Paris mérite mieux que cela !
La réflexion sur la structure institutionnelle qui doit prévaloir au cœur de la région francilienne ne peut échapper à une approche plus large, à l’échelle du poids du territoire et de son importance politique. Que veut-on faire de cette intercommunalité, quels seront les rapports avec les autres collectivités territoriales, quelle sera sa place en France, quelle cohérence avec l’Europe ?
Je suis frappé, dans les débats actuels, par l’absence d’approche globale intégrant l’ensemble des niveaux institutionnels dans une réflexion politique. Ni la droite ni les partis de gauche (PS ou PC) ne dépassent, dans leurs réflexions, les limites de l’Ile de France.
Des régions à taille européenne…
L’Europe telle qu’elle se construit délite les Etats nations au profit de territoires plus éclatés. Les tensions internes aux pays sont de plus en plus nombreuses qu’il s’agisse de vieux pays comme la Belgique, les Pays-Bas ou l’Italie, ou de pays plus jeunes comme la Serbie. Les Verts prônent depuis longtemps une Europe des régions basée sur le fédéralisme, et cette proposition démontre chaque jour dans les faits son bien-fondé. Le fait régional entre dans les mœurs des derniers pays jacobins tandis qu’il est déjà ancré profondément en Catalogne ou dans les Länder allemands. Il y a 25 ans, la France découpait son territoire métropolitain en petites unités de peur de voir se construire des contre-pouvoirs face à l’Etat centralisé. La conséquence aujourd’hui en est la faiblesse des régions françaises comparées à leurs homologues étrangères. Que pèse le Languedoc-Roussillon en face de la puissante Catalogne ? Quelle région française peut se comparer à la Bavière ?
Pourtant, les élections européennes en France métropolitaine reposent sur un autre découpage, plus restreint de 7 régions. N’est-ce pas là, la préfiguration d’une autre échelle ? Penser l’articulation entre un Grand Paris et sa région doit conduire à envisager en priorité le positionnement des régions, dont l’Ile de France, dans l’Europe. Pour ma part je suis partisan de reprendre le projet inachevé de la DATAR et de réduire à 8 ou 9 le nombre des régions françaises, pour leur donner enfin un rôle réel, tant en France qu’en Europe. Mesure qui doit s’accompagner évidemment d’une décentralisation supplémentaire de l’Etat et permettre un accroissement des compétences des régions. Dans ce contexte, l’Ile de France verrait ses limites repoussées pour absorber une partie des régions limitrophes déjà largement influencées par le tropisme francilien et le Grand Paris y trouverait toute sa place.
Quelles seraient les conséquences au plan national de l’articulation harmonieuse ainsi réalisée des régions avec l’Europe ?
Un Sénat des régions…
En son temps, le général de Gaulle a trébuché sur un double refus, la régionalisation et la réforme du Sénat. Certes il s’agissait de fusionner le Sénat et le Conseil économique et social, mais le diagnostic pointait déjà l’absence de représentativité de la chambre haute. La réponse négative qui portait alors tout autant sur des questions non posées comme souvent dans un référendum a laissé la réforme du Sénat en panne depuis 40 ans. Tout plaide aujourd’hui pour qu’il soit calqué sur les autres chambres hautes européennes et devienne l’émanation des régions. S’affranchissant des départements qui pourraient enfin être supprimés, les sénateurs seraient élus à la proportionnelle dans les 8 ou 9 régions nouvellement créées.
Un Grand Paris qui trouve sa place…
Dans ce cadre d’une région francilienne élargie, dotée de compétences nouvelles et des départements supprimés, la création d’une structure intercommunale forte au sein de l’agglomération capitale ne constituerait plus un contre-pouvoir à la région ni un cheval de Troie. Au contraire les synergies nécessaires seraient facilitées et les solidarités indispensables deviendraient la règle.
Dans ce schéma, la création d’une communauté urbaine prendrait tout son sens, notamment grâce à une fiscalité unique permettant le financement des projets de rééquilibrages aussi urgents qu’indispensables.
A Paris, pour que la ville centre n’écrase pas ses voisines, il faudrait aller plus loin et faire en sorte que les arrondissements élisent directement leurs représentants au sein du Grand Paris. Les 10 plus peuplés sont plus importants que les plus grandes villes des banlieues parisiennes. Comment accepter leur quasi-inexistence et leur totale absence de pouvoir de décision sur leur territoire ? Comment admettre qu’ils n’aient pas le droit de contractualiser avec les communes riveraines pour régler les questions communes ? Le code des communes n’a pas oublié que chaque arrondissement ne porte pas seulement un numéro mais aussi un nom : Ménilmontant, Popincourt, Passy, Vaugirard, etc. Cette organisation aurait le mérite de garantir le maintien d’un lien de proximité entre les citoyens et leurs élus, demande grandissante tout autant que légitime.
Une cohérence institutionnelle à tous les niveaux…
Le schéma institutionnel que je propose repose sur des principes simples largement partagés au sein des Verts : prééminence des régions de taille européenne, suppression des départements, préférence aux intercommunalités comme territoires de projet, réforme démocratique du Sénat, maintien du lien de proximité entre citoyens et élus.
Solidarité et subsidiarité, pertinence des échelles, viabilité et complémentarité des structures, vision globale et européenne, dépassement des enjeux politiciens à courte vue, voilà ce qui devrait conduire la réflexion pour que Paris et les régions trouvent toute leur place en Europe.
Trés bonne analyse : le fait intercommunal n’émergera que lorsqu’on dépassera l’opposition factice Paris/banlieue par une refonte de la taille et de la compétence des régions notamment. Mais on peut aussi imaginer que le découpage actuel des arrondissements soit revu dans cette nouvelle cohérence que tu esquisses. Enfin, l’élection au premier niveau de cette structure interco implique qu’on remette à plat le statut des CU.
Redonner leurs noms aux arrondissements voilà un beau projet, ces chiffres c’est tellement sinistre..Comment voulez-vous vous identifier à ça ? si on veut développer une véritable démocratie de proximitè il faut un territoire auquel on peut se référer, dans lequel on peut se reconnaitre. Vaugirard, Montmartre, Popincourt…c’est autre chose que ces désignations orwellienes actuelles. Bien sur il faudra en ré adapter certains mais après tout voilà un beau débat local qui sera l’occasion de se replonger dans l’histoires de nos lieux de vie.
Effectivement à plus ou moins long terme la frontière Paris/banlieue s’effacera, ces chiffres ne voudront alors plus rien dire. Cette réforme toute simple pourra aussi être un pas en direction de la banlieue.
Génial Yves cette idée de donner des noms aux arrondissements, ça au moins c’est un peu nouveau. C’est vrai qu’un nombre ça ne parle pas, un nom si. continue à nous faire ce genre de proposition et mets celle-ci en application dès le prochain mandat.
Avec le Grand Paris bien sur ! A ce propos il ne s’agit pas d’agglomération francilienne mais bien parisienne, l’Ile-de-France c’est dans ces limites actuelles à 80% rurale, c’est pas une métropole.