Après la tentative de passage en force avec la tour Triangle
dans le 15è, voilà que le Maire de Paris tente d’aller encore plus loin et de frapper plus fort dans le 13è.
Sans aucune discussion préalable avec les élus et sans que ces derniers aient reçu les documents préparatoires, le Maire de Paris a voulu faire voter le Conseil de Paris pour l’autoriser à réviser le PLU (Plan local d’urbanisme) afin de l’autoriser à construire des tours dans le quartier Masséna Bruneseau.
Pour montrer leur opposition déterminée tant sur la forme que sur le fond, touTEs les éluEs du groupe Les Verts ont pris la parole lors de ce conseil pour expliquer en quoi ce projet est contraire à toute idée de développement durable et ne répond en rien aux attentes et besoins des Parisiennes et Parisiens.
Voici le texte de mon intervention :
En 1912 l’Etat et la Ville de Paris signaient une convention entérinée par la loi du 19 avril 1919, par laquelle l’Etat cédait à la Ville l’enceinte fortifiée et la zone non aedificandi de 250m calculée à partir du glacis des fortifications. La Ville s’engageait à y construire des logements et « à y aménager des espaces libres tels que parcs publics et terrains de jeux ».
Le 10 avril 1930 une nouvelle loi confirmait la loi de 1919.
Ces dispositions n’ont pas été prises par hasard. Elles correspondent surtout à une analyse de la situation du logement à l’époque et au besoin, déjà fortement exprimé par certains, de résoudre en hauteur la crise du logement. D’ailleurs un projet complet de « 100 maisons tours » fut présenté en novembre 1920 par Auguste Perret sur toute la zone des fortifications.
Cela semble indiquer que le projet qui nous est présenté n’a réellement rien de novateur.
Malgré la crise du logement d’après guerre, le 7 février 1953 un amendement à la loi de finances, connu à tort sous le nom de loi Lafay, allégeait légèrement le dispositif en autorisant la construction de 20% de la zone à condition de trouver des compensations en espaces libres dans Paris intra muros. Pour autant l’article 13 précise que les seules constructions autorisées sont des groupes d’immeubles à usage d’habitation ou à usage d’intérêt public ainsi que des bâtiments publics.
Or cette loi n’ayant jamais été abrogée est toujours d’application.
Le projet qui nous est proposé ne semble donc pas conforme à la loi Lafay puisqu’il prévoit notamment des immeubles à usage de bureaux destination non admise sur ce territoire.
Par ailleurs la méthode qui nous est proposée repose sur l’utilisation de la procédure de révision simplifiée du PLU. Si l’article 123 -13 du code de l’urbanisme admet la possibilité d’une révision simplifiée des PLU, ce recours est particulièrement encadré. Il ne peut en effet s’agir que d’une construction ou d’une opération d’intérêt général.
Or l’article R 121-3 du même code précise ce que signifie « intérêt général ».
Je cite quelques extraits qui montrent bien ce qu’est l’intérêt général.
« Peut constituer un projet d’intérêt général tout projet d’ouvrage, de travaux ou de protection présentant un caractère d’utilité publique et répondant aux conditions suivantes :
1º Etre destiné à la réalisation d’une opération d’aménagement ou d’équipement, au fonctionnement d’un service public, à l’accueil et au logement des personnes défavorisées ou de ressources modestes, à la protection du patrimoine naturel ou culturel, à la prévention des risques, à la mise en valeur des ressources naturelles ou à l’aménagement agricole et rural ;
Les projets relevant de l’initiative des communes ne peuvent être qualifiés de projets d’intérêt général. »
La délibération qui nous est soumise semble donc avoir pris quelques libertés avec le code de l’urbanisme.
Il semble donc bien que la seule possibilité ouverte par le code de l’urbanisme soit la procédure de révision et non de révision simplifiée.
J’ajoute que par delà ces considération juridiques, lors du débat de juillet 2008 le Maire de Paris avait pris soin d’expliquer longuement les conditions dans lesquelles toute évolution devait s’inscrire.
Je ne dispose pas du temps nécessaire pour lire intégralement cette partie de la délibération. Il était cependant prévu
1 – l’organisation d’un dialogue soutenu et ouvert avec les Parisiens, et l’ensemble du public concerné.
A titre d’exemple, une conférence citoyenne pourrait être organisée en s’inspirant de l’expérience de celle que le CAUE de Paris avait organisée fin 2007 et début 2008 sur les formes urbaines et la hauteur.
Le site paris.fr sera un support important de cette démarche. Dans une rubrique dédiée, les internautes trouveront une information complète présentant les éléments du débat.
Des ateliers thématiques, pouvant porter par exemple sur les usages aujourd’hui et demain dans les immeubles hauts, les performances énergétiques et la production d’énergie renouvelable dans les immeubles de grande hauteur, la notion de ville durable ville dense,…seront organisés en lien avec les structures d’information et de communication sur l’urbanisme et l’architecture liées à la Ville. Des comptes rendus (textes, vidéo) seront diffusés sur Internet ou sur d’autres supports.
2 – l’intensification de la concertation locale sur les projets dans les arrondissements, élargie aux communes riveraines.
Sur les sites concernés, une concertation sera mise en œuvre en amont des enquêtes publiques. Les projets seront notamment présentés et discutés dans des réunions publiques en présence des acteurs locaux de la concertation. Les structures existantes de concertation, si besoin renforcées, seront le vecteur de ce travail.
Cette concertation se déroulera principalement en deux temps : un temps pour permettre l’expression des propositions locales et un autre pour répondre aux propositions formulées.
Des informations et des documents illustrant l’opération et son contexte seront notamment diffusés sur le lieu de réunion, et consultables sur internet. Des comptes rendus (synthèses écrites, vidéo, …) permettront une « traçabilité » de ces réunions.
Ces réunions associeront les communes limitrophes et en tant que de besoin les autres collectivités de l’agglomération parisienne. (fin de citation).
A ce jour il est évident que cette phase n’a pas débuté alors qu’on nous demande déjà de voter.
Il est simplement proposé de reprendre quasiment mot pour mot la même organisation de la concertation que ce qui nous était promis il y a 8 mois.
Cela ne peut nous satisfaire.
Cela ne satisfait d’ailleurs pas les habitants et les associations du 13è qui ont d’ores et déjà produit des documents particulièrement vifs tant à propos de la forme que sur le fond.
Nous ne pouvons que nous interroger sur une telle précipitation ?
En conclusion, les Verts demandent que ce projet soir remis sur l’ouvrage avant toute décision. La concertation doit être reprise au début et dans l’ordre et la procédure doit être revue pour être conforme à la loi et son esprit.
Il est encore temps de ne pas s’enfermer dans une position de principe visant à rechercher un déplafonnement des hauteurs à n’importe quel prix.
C’est le bon sens qui le commande.