Désireux de garder égoïstement le tournoi de Roland Garros à Paris à n’importe quel prix, le Maire de Paris se bat contre les arguments les plus précis montrant l’atteinte irréparable au patrimoine que constituerait l’agrandissement de l’actuel stade dans le Jardin des Serres d’Auteuil.
Pour cela les mensonges et désinformations en tout genre se succèdent et s’amplifient, à la hauteur de la mobilisation gigantesque et exemplaire pour sauver ce jardin botanique.
Le premier et le plus énorme des mensonges consiste à faire croire que les opposants au projet se trompent (ou sont trompés) car les serres historiques classées monuments historiques ne seront pas touchées.
Cette argumentation est particulièrement fallacieuse car personne n’accuse la Mairie de Paris de vouloir toucher à cette partie du jardin, ce qu’elle ne pourrait pas faire en tout état de cause compte tenu de ce classement.
Les dizaines de milliers de signataires de la pétition contre le saccage du jardin ne sont pas idiots et savent lire. Il est écrit de façon très précise :
La Fédération Française de Tennis envisage la « fusion » du tournoi de Roland-Garros et de l’ensemble du jardin et des Serres d’Auteuil, notamment l’annexion de l’Orangerie et autres bâtiments techniques protégés. Elle projette également de construire un court de tennis de 7 000 places à l’emplacement des « Serres chaudes », contenant des collections rarissimes, telles des orchidées plus que centenaires.
Cette façon de procéder rappelle étrangement la méthode utilisée par le Gouvernement lors de la participation des lycéens aux manifestations contre la réforme des retraites, criant à la manipulation et méprisant ainsi les lycées considérés comme incapables d’avoir un jugement intelligent.
Un deuxième mensonge est maintenant proféré : la commission des sites aurait donné son accord au projet.
Pour avoir participé à cette commission, j’ai noté avec intérêt les déclarations du Préfet qui a tenu à préciser à plusieurs reprises et en insistant fortement, qu’en aucun cas la commission n’avait à se prononcer sur le projet mais seulement sur la possibilité ou non d’autoriser la Fédération française de tennis à poursuivre les études. Le Préfet a bien pris soin de compléter que la Commission devrait se prononcer sur un projet si (par malheur, ça c’est moi qui le dit) le dossier venait à aboutir et se traduire par le dépôt d’un permis de construire.
Un troisième mensonge complète les deux premiers. Le patrimoine végétal ne craindrait rien car il serait transféré soit dans de nouvelles serres entourant le court de tennis prévu à leur place actuelle, soit au Parc Floral de Vincennes.
Or cela est peu envisageable pour deux raisons qui se conjuguent. La première repose sur le fait que les nouvelles serres ne pourraient accueillir qu’environ un quart des plantes actuelles. Il faudrait donc transférer près des trois quarts des serres à Vincennes. Et c’est là qu’intervient la seconde raison. Les pavillons du Parc Floral sont trop petits pour accueillir les collections. Et le Parc Floral est dans le bois de Vincennes (espace boisé classé) donc totalement inconstructible. Il est donc impossible de garantir la pérennité des collections si le court de tennis est construit.
Un quatrième mensonge a été énoncé lors de la Commission des sites : la partie du jardin des Serres d’Auteuil accueillant les serres chaudes serait inaccessible au public. Il faut croire que les élus qui prétendent cela n’ont jamais mis les pieds sur le site. Ces serres sont évidemment ouvertes au public très librement et une documentation pédagogique a été installée afin que les visiteurs puissent apprécier encore mieux les superbes orchidées ou fougères.
Cinquième mensonge : les serres chaudes et de travail auraient été construites entre 1980 et 2000. Soit le Maire de Paris s’est fait manipulé par ses services, soit ces derniers ont la mémoire courte. Ces serres sont évidemment beaucoup plus anciennes que cela. La preuve en est que j’ai fait moi-même décidé de la rénovation des serres de travail en 2004 compte tenu de leur état de vétusté. Quant aux serres chaudes, il suffit de les regarder pour comprendre qu’elles ne peuvent avoir de 10 à 30 ans.
Sixième mensonge, par omission, à propos du financement du projet. Non seulement la ville financerait une partie importante du projet mais de plus elle n’a pas calculé ce que cela coûterait en frais supplémentaires s’il fallait transporter les collections végétales sur un autre site. Ainsi pour le seul réaménagement du carrefour de la Porte d’Auteuil, la mairie de Paris prévoit de dépenser 20 millions d’euros. Sachant que la Fédération française de tennis de paie qu’un peu plus d’un million et demi d’euros par an à la Ville, cela revient à lui faire cadeau de plus de 13 années de redevance !
Septième mensonge à propos des accès à Roland Garros. Actuellement le tournoi accueille environ 35 000 spectateurs chaque jour. Ces derniers doivent emprunter les deux voies qui entourent le jardin des Serres d’Auteuil pour se rendre sur le stade. La fédération française de tennis veut porter la capacité à 40 000 spectateurs par jour et les faire traverser le square des Poètes puis le jardin des Serres d’Auteuil. La ville de Paris prétend que cela ne changera rien ce qui est évidemment totalement faux. Le passage de 80 000 personnes (40 000 à l’aller et autant au retour) dans des sites aussi fragiles les condamneraient irrémédiablement compte tenu des piétinements engendrés.
Il ne s’agit là que des mensonges les plus criants. En regardant de près le dossier, bien d’autres éléments montrent que ce projet repose sur un seul point : rester là quelles qu’en soient les conséquences au plan patrimonial et environnemental. C’est le cynisme le plus total, l’inculture qui s’étale, l’égoïsme qui s’affiche.
Nous sommes déjà plus de 25 000 à avoir signé la pétition contre cette énormité. Combien faudra-t-il donc que nous soyons pour faire entendre raison ?
Les écologistes se sont opposés à plusieurs projets stupides ou ringards au sein de la majorité du Conseil de Paris. Celui-ci est sans doute le plus emblématique car il touche à ce qui fonde les valeurs de l’écologie : la sauvegarde de la biodiversité et le respect de la parole donnée.
Cher Yves Contassot,
plus on creuse le dossier, plus on s’indigne des mensonges proférés par la Ville de Paris, plus il est évident que la première impression est la bonne: quand on connait le site, il est clair que si Roland-Garros met le pied dans le jardin botanique des Serres d’Auteuil, ce site patrimonial est condamné à brève échéance, comme je l’ai écrit sur le site de la pétition. Il se retrouvera pris en tenaille entre les deux pôles de Roland-Garros et rapidement étouffé.
Par ailleurs je m’étonne de ce que nul ne parle de solutions alternatives: si l’ont veut à tout prix garder Roland-Garros à Paris, pourquoi ne pas envisager d’autres solutions comme la couverture de la bretelle du périphérique ou bien l’utilisation du futur stade Jean-Bouin comme court de tennis pendant le tournoi?
Ces hypothèses sont-elles politiquement incorrectes?
Chaleureusement,
LBM
La couverture de l’autoroute et du périphérique avait été proposée par le précédent président de la fédération française de tennis. Cependant cela coûtait très cher et la FFT aurait voulu que ce soit la ville qui paie. Pour ma part je trouve que cela pourrait constituer un compromis de couvrir ces voies et que la FFT prenne en charge ces travauxX
Pour une fois, on va faire cause commune.
Très bien votre billet.