Lors de sa séance du 9 mars, le Conseil de Paris était appelé à se prononcer sur le renouvellement des marchés de collecte des déchets ménagers pour les arrondissements qui ne sont pas collectés en régie municipale.
Ce débat fait suite à celui de juillet 2008 au cours duquel je m’étais vivement élevé contre les projets de privatisation dans 4 arrondissements.
Depuis nous avions appris de façon non officielle que devant la mobilisation des éboueurs et de plusieurs partis de la majorité, le Maire de Paris avait reculé dans deux arrondissements, les 9è et 16è, les maintenant dans la sphère publique.
Seuls les 3è et 19è arrondissements seront donc privatisés.
Cependant l’attribution de ces marchés soulèvent de nombreuses questions et c’est le sens de l’intervention que j’ai effectuée et que je reproduis ci-après.
Conseil de Paris des 9 et 10 mars 2009
Lors de sa séance du 7 juillet 2008, notre Assemblée a longuement débattu des modalités devant être retenues pour la collecte des déchets ménagers et assimilés au cours de ce mandat.
A l’issue de ce débat, 73 Conseillers de Paris sur les 154 présents (soit un peu plus de 47%) ont voté la délibération proposée assortie de vœux et amendée par l’exécutif.
Cette délibération prévoyait plusieurs options et il était convenu que les discussions se poursuivraient avant toute décision finale.
Force est de constater que notre Conseil n’a pas été saisi depuis le mois de juillet du moindre débat sur cette question.
Force également est de constater que le résultat des arbitrages effectués n’apparaît nulle part compte tenu des documents qui nous ont été distribués avant la séance. L’annexe à la délibération DAJ 5 ne mentionne pas le périmètre des lots attribués et donc ne permet pas de savoir laquelle des options a finalement été choisie.
Comme évidemment tout ou presque finit par se savoir au sein de cette institution, nous savons que la Ville a renoncé partiellement à privatiser la collecte des déchets notamment dans les 9è et 16è arrondissements, mais maintient la privatisation dans les 3è et 19è arrondissements.
Cette décision aurait pu, aurait du être mise à l’ordre du jour pour que nous puissions démocratiquement nous prononcer sur son principe. C’est le premier point d’insatisfaction pour notre groupe.
Un deuxième motif d’insatisfaction tient à la modification du cahier des charges et à ses conséquences.
L’exécutif a choisi de renforcer de façon très importante le poids du prix au sein des critères d’attribution. Les évolutions importantes en matière d’environnement ou de clauses sociales, notamment d’insertion, qui avaient été introduites dans les précédents marchés ont été fortement remises en cause. En effet le critère prix pèse à lui seul près des deux/tiers dans la notation des offres.
Or dans ce type de marchés de main d’œuvre, la masse salariale constitue à l’évidence l’essentiel des coûts. Dans les marchés de collecte cela représente environ 65% du prix du marché.
Mettre la pression comme cela a été fait de façon aussi importante sur les prix, c’est mettre la pression sur les salaires dans les entreprises qui veulent remporter les marchés. Inutile de nous faire croire que ce sera la marge qui diminuera. Non seulement aucune entreprise n’accepte de travailler à marge réduite mais ce serait qui plus est illégal de travailler à perte.
Or nous savons toutes et tous sur ces bancs que lors d’une attribution de marchés, le gagnant doit reprendre les personnels des entreprises qui avaient les marchés auparavant.
Cela donne toujours lieu à des tractations délicates car le code du travail ne prévoit pas la reprise intégrale des revenus des salariés mais seulement les salaires de la convention collective.
Or dans les attributions qui nous sont proposées les écarts de prix sont tellement importants que la seule solution pour certaines entreprises attributaires consistera à diminuer la masse salariale pour respecter ses engagements et ne pas travailler à perte. Cela est d’autant plus vrai que nous assistons à une diminution très forte de la production des déchets, liée à la crise économique. Or les entreprises sont payées à la tonne collectée. Comme les coûts de collecte vont rester les mêmes car il faut toujours autant de monde pour collecter les bacs même si chacun d’eux est moins rempli, c’est encore une pression considérable sur les salaires qui va se produire.
Lorsque l’on regarde les prix proposés par une entreprise notamment on peut estimer que pour tenir ses engagements elle devra diminuer la masse salariale actuelle de plus de 20%.
Comment pourrions nous cautionner cela dans le contexte social actuel ?
Par delà ces motifs d’insatisfaction nous avons plus que des craintes sur la qualité du service qui sera délivré aux Parisiennes et aux Parisiens.
Pour collecter à Paris il faut des infrastructures lourdes et coûteuses, tant en bennes qu’en garages. L’examen des attributions ne peut que laisser perplexe surtout quand on sait qu’un candidat a été éliminé au motif qu’il n’avait pas la surface nécessaire pour assurer les prestations envisagées. Quelles sont les garanties de la Ville, sachant qu’une rumeur insistante court dans la profession que le principal attributaire cherche désespérément des bennes et qu’il serait déjà prêt à renoncer à un ou plusieurs lots ?
Enfin que dire du principe même qui consiste à attribuer l’essentiel des marchés à une seule entreprise alors même que l’allotissement a pour objectif de garantir une meilleure concurrence. Nous avions deux multinationales, début 2001 qui se répartissaient ces marchés. Nous avons souhaité casser ce monopole et il serait tout à fait dommageable qu’on y revienne maintenant.
D’autant plus que certains chiffres ne laissent pas de nous étonner. Arriver à proposer un prix s’approchant de 5 centimes d’euros de l’estimation des services à 25 952 565,16 euros relève de la divination ou de la transmission de pensée.
Nous avons été également surpris que la Mairie de Paris se sente tenue de publier un communiqué de presse pour annoncer les décisions de la CAO. Non seulement les attributions ne font pas l’objet habituellement de communiqués de presse, mais nous ne savions pas qu’il existait une catégorie de communiqués de presse quasi clandestins, non envoyés aux destinataires habituels et non publiés sur le site de la Mairie.
Vous comprendrez donc aisément que pour toutes ces raisons le Groupe des éluEs Verts ne peut pas voter une telle délibération.