Décentraliser ? Oui ! Mais dans un cadre précis.

Lors de sa séance du 2 février 2009, Conseil de Paris a pris connaissance d’une communication du Maire de Paris qui annonce son intention de décentraliser une partie des compétences de la Ville dans les arrondissements.

A priori j’aurais du sauter de joie à cette annonce. Pourtant je ne peux m’empêcher de lui trouver comme un air de « pure com ».

Voici donc l’intervention que j’ai faite au nom des éluEs VertEs.

Monsieur le Maire, mes chers collègues,

Le débat que vous nous proposez aujourd’hui doit nécessairement être restitué dans son contexte. L’avenir institutionnel de Paris et l’organisation des compétences respectives de la Mairie centrale et des mairies d’arrondissement ne sauraient en effet s’abstraire des réflexions du comité pour la réforme des collectivités locales, dit comité Balladur, pas plus qu’il n’est possible de faire abstraction de la mission confiée à Christian Blanc sur le Grand Paris ou encore des débats et manœuvres autour du SDRIF.

S’il y a un point commun dans tout cela c’est bien que la pire des choses serait l’immobilisme, le statu quo vaguement relooké afin de faire croire que tout change pour que rien ne change comme la révolution est analysée par Tancredi, neveu du Prince Salina alias le Guépard.

Personne ne peut prétendre aujourd’hui que l’articulation des compétences des différentes strates du mille-feuilles institutionnel et que leur empilement est source d’efficacité et de compréhension des lieux de décision et donc de responsabilités pour les citoyens.

Augmenter toujours plus le nombre de niveaux sans oser supprimer ceux devenus obsolètes n’ajouterait qu’à la confusion.

Il s’agit donc d’ancrer notre débat dans ce contexte.

La question qui nous est posée aujourd’hui est de savoir s’il faut décentraliser ou seulement déconcentrer. Pour les Verts la réponse est nette : il faut simplifier et clarifier !

Simplifier ce qui implique d’appliquer le principe de subsidiarité : faire à un niveau supérieur uniquement si c’est plus efficace, ce qui signifie rendre un meilleur service aux citoyens.

Clarifier et pour cela aller progressivement mais fermement vers le principe de la compétence unique pour chaque niveau. Ne plus faire croire que l’on peut faire la même chose à tous les niveaux. Ne plus empêcher les citoyens de savoir qui est responsable.

C’est pour cela que les Verts ont proposé la suppression des départements pour ne garder que trois niveaux : la commune, l’intercommunalité et les régions, que nous considérons comme base d’une Europe fédérale. C’est ce que nous avons plaidé devant le Comité Balladur.

En toute logique si l’on veut aboutir à une telle organisation, qui existe dans la plupart des démocraties modernes, le statu quo parisien n’est pas possible.

Cette question a été posée dès 1982 lors des débats sur la loi PML. Fallait-il créer une intercommunalité en faisant des arrondissements des communes de plein exercice ou innover en créant un niveau supplémentaire.

Pour des raisons politiciennes évidentes, la négociation entre le ministre de l’intérieur d’alors, maire de Marseille, et le maire de Paris, s’est terminée par le statut ambigu que nous connaissons encore à ce jour.

Il est vrai que les ambitions nationales du Maire de Paris de l’époque pesèrent fortement sur les débats. L’intérêt des Parisiennes et Parisiens passa manifestement après la carrière du premier magistrat de la capitale.

L’histoire ne se répétant pas dit-on, il s’agit maintenant de concevoir un schéma dans lequel les arrondissements, lieux de la démocratie élective directe, trouvent toute leur place. A l’instar de la capitale anglaise, pays considéré comme la mère des démocraties modernes, il faut aller vers des arrondissements de plein exercice au sein d’une intercommunalité du Grand Paris dans une nouvelle région Francilienne plus conforme à l’échelle du bassin parisien.

Cela ne préjuge évidemment pas de la forme juridique de l’intercommunalité à créer mais quelle qu’elle soit, les rapports démographiques plaident pour que ce soit les arrondissements qui y siègent, faute de quoi le poids de la ville de Paris empêchera la structure de fonctionner démocratiquement.

La communication de ce matin peut et doit s’inscrire dans cette démarche. C’est possible s’il n’y a pas d’arrières pensés ni d’un côte ni de l’autre. C’est possible à condition que personne ne cherche à récupérer les compétences positives en se défaussant sur l’autre des difficultés.

Pour cela il faut sans doute passer par une phase intermédiaire dans laquelle les arrondissements disposeront progressivement du même pouvoir de décision que la mairie centrale puis en disposeront seuls.

Prenons un exemple pour illustrer cela : en matière de propreté il serait tout à fait normal que la co-décision deviennent la règle mais pas uniquement pour la communication et la gestion des doléances, mais aussi pour la définition des moyens humains et matériels. Sinon ce serait un marché de dupes.

De même qu’il serait tout à fait dangereux de séparer les éboueurs en deux catégories la première dépendant de la mairie centrale pour les tâches de collecte tandis que la seconde serait sous la responsabilité des maires d’arrondissement pour le nettoiement. Ce serait à l’évidence une régression sociale importante pour ces personnels et donc inacceptable.

Le processus que vous voulez initier est porteur d’espoirs s’il s’inscrit en même temps dans la construction d’une solidarité des territoires tant au plan parisien qu’avec les communes environnantes. Il faut tout à la fois décentraliser réellement et déléguer davantage à une structure intercommunale.

Ne plus connaître la chasse à la taxe professionnelle actuelle qui voit chaque commune tenter de construire toujours plus de bureaux, y compris en hauteur, même si c’est au détriment de ses voisins. Admettre qu’en matière de transports l’échelle pertinente est la région ne fait quasiment plus débat. Engageons nous dans une telle démarche résolument et sans frilosité pour de nombreux autres thèmes.

Admettons enfin que pour conclure un accord sur les modalités de gestion des limites communales, les arrondissements sont les mieux placés pour négocier avec la commune voisine.

Nous vous avons entendu Monsieur le Maire agiter l’épouvantail du démantèlement de Paris si nos propositions étaient retenues. Nous n’en croyons rien bien au contraire. Une réelle intercommunalité bénéficieraient de compétences indiscutables avec la possibilité de rééquilibrer les territoires, c’est même l’objectif premier de ces structures. Ne nous amusons donc pas à nous faire peur pour rien.

Les propositions que vous formulez Monsieur le Maire et qui mériteront d’être analysées plus en détail lors des délibérations subséquentes annoncées pour les prochains mois, font néanmoins l’impasse sur un point tout à fait essentiel à nos yeux.

La décentralisation que vous envisagez va se traduire par un surcroît de responsabilités pour les élus des arrondissements. Or, la plupart sont des bénévoles qui ne bénéficient pas de la moindre indemnité. Il conviendrait donc que là encore la loi P¨ML soit modifiée pour que justice leur soit rendu.

Nous ne doutons pas une seconde que sur ce point au moins, il y aura unanimité au sein du Conseil de Paris. Je vous remercie.

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