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« Au bord du monde » : un film à voir absolument

Claus Drexel a réalisé ce film sur les sans abri avec une délicatesse, une sensibilité, une humanité qu’on aimerait voir partagées par le plus grand nombre.

Accompagné par Sylvain Leser, qui photographie la rue et ses occupants sans toit depuis des années, Claus Drexel révèle toute la douleur de ces êtres et en même temps arrive à leur donner la parole d’une façon exceptionnelle. Le choix des plans fixes, longs mais jamais ennuyeux, la beauté de Paris la nuit, les cadrages parfaits, tout concourt à une harmonie qui rend la situation sociale et psychologique plus insupportable encore. Sans oublier la superbe musique de Puccini au final. Turandot vaincu par l’amour, quelle belle allégorie pour les sans abri : que la misère soit vaincue comme Turandot !

Faire croire qu’il s’agit d’une simple question de logement comme l’ont déclaré les deux principales candidates à la Mairie de Paris, prouve qu’elles ignorent totalement la réalité de la rue.

Ayant eu l’occasion de m’occuper de deux de ces sans abri, je sais à quel point le logement est souvent un aboutissement et rarement un point de départ. L’accompagnement dans le retour à la vie sociale est une priorité.
Cela est vrai dans la vie, cela est vrai dans la mort, et je suis fier, encore aujourd’hui, d’avoir permis que les « morts de la rue » aient droit à une sépulture digne dans les cimetières parisiens.

Allez voir ce film, parlez-en autour de vous, organisez des projections.
En attendant régalez vous de la bande annonce

Le 1er février 1954 l’Abbé Pierre lançait un appel

Mes amis, au secours…

Une femme vient de mourir gelée, cette nuit à 3 heures, sur le trottoir du boulevard Sébastopol, serrant sur elle le papier par lequel, avant-hier, on l’avait expulsée. Chaque nuit, ils sont plus de 2000 recroquevillés sous le gel, sans toit, sans pain, plus d’un presque nu. Devant l’horreur, les cités d’urgence, ce n’est même plus assez urgent!

Les premières lignes de cet appel (à lire intégralement ici) ont-elles pris une ride en 60 ans ? Hélas non !

En 2014, à Paris notamment, des femmes et des hommes, de plus en plus nombreux dorment dehors accompagnés quelques fois d’enfants.

Pourtant la France est riche malgré ses inégalités qui s’accroissent.

Pourtant Paris est une des communes les plus riches de France et d’Europe.

Pourtant ce fléau du mal-logement n’a pas diminué, bien au contraire.

Les causes en sont connues : une spéculation immobilière effrénée encouragée par des politiques visant à donner la priorité aux bureaux plutôt qu’aux logements, aux tourisme plutôt qu’aux résidents, bref une politique qui vise le court terme et la course à l’argent facile plutôt que la résolution d’un problème qui devrait indigner les responsables politiques et les inciter à en faire une priorité absolue.

Dans le 13ème arrondissement nous connaissons bien la question de l’hébergement d’urgence vu le nombre de structures d’accueil qui s’y trouvent, sans compter les nombreux foyers de travailleurs migrants.

Certes depuis peu des rénovations ont été entreprises car les conditions d’accueil y étaient scandaleuses.

Mais la réponse n’est pas à la hauteur des besoins. Le discours dominant consistant à vouloir régler la question au plan métropolitain n’est qu’un cache misère et repose davantage sur une vision égoïste (Plus loin les pauvres !) qu’une vision solidaire.

Oui l’Abbé, votre cri nous interpelle et il nous manque !

Combien faudra-t-il encore de morts dans la rue pour qu’enfin une politique digne de ce nom soit mise en œuvre au plan local ?