Crise monétaire ou crise morale ?

La semaine passée, j’écrivais que la crise monétaire démontrait aussi une crise de la pensée monétaire.

J’invitais évidemment le président de la Banque Centrale européenne à ne pas suivre ses penchants naturels pour l’orthodoxie financière la plus stricte.

Je constate avec plaisir que malgré des démangeaisons sans doute insupportables, il a finalement été contraint de se ranger à l’avis de celles et ceux qui affirment depuis des semaines que nous sommes devant une crise d’une grande ampleur et que les solutions traditionnelles ne sont pas de mise. Renonçant à augmenter les taux directeurs de la BCE, M. Trichet admet donc implicitement l’ampleur de la crise.

Mieux encore, son homologue pendant des années à la FED (la Banque centrale des Etats-Unis), M. Greenspan, alias le gourou des places financières, décrit la crise comme une des plus graves jamais connue, à l’instar de celles de 1929 !

Les banques allemandes se trouvent dans une situation de quasi faillite pour certaines et des observateurs d’outre Rhin comparent la situation à la période de 1931 !

Et pendant ce temps, M. Trichet reste persuadé que seule l’inflation constitue un facteur de risque à court ou moyen terme.

Dans Le Monde de ce samedi 8 septembre, Eric Le Boucher analyse finement les ressorts de la crise et conclut comme moi qu’il y a scandale sous roche.

Il est temps de demander des comptes aux organismes de surveillance du système bancaire et à tous ces donneurs de leçons qui prétendent gérer le monde à travers les institutions financières.

Pourquoi n’ont-ils rien vu venir alors que certains les mettaient en garde depuis des années sur les marchés dérivés et la titrisation tous azimuts ?

Pourquoi s’évertuent-ils à sauver les actionnaires des banques en difficultés alors que ce sont les emprunteurs et les épargnants qui font les frais de cette crise ?

Pourquoi ne veulent-ils pas changer les règles du jeu et interdire certaines pratiques à risques telles qu’on les voit se développer aujourd’hui encore plus qu’hier ?

Ainsi en France, depuis quelques mois les Banques ont dangereusement allongé les durées des crédits immobiliers, les faisant passer jusqu’à 30 ans voire plus. Or emprunter sur une durée aussi longue est particulièrement dangereux. En cas de changement de situation personnelle ou en cas de changements de taux dans des proportions forte, les emprunteurs se retrouvent obligés de vendre et ne récupèrent rien des remboursements car ils n’ont payés que les intérêts.

Que fait le Gouvernement de MM. Sarkozy et Fillon ? Eux si prompts à fustiger la BCE ! Rien évidemment car les banquiers sont leurs amis.

C’est une vaste réforme du système bancaire qui est nécessaire. L’argent n’est pas une marchandise comme les autres et il est anormal que seules les lois du marché régissent les placements et les taux. Mitterrand avait osé nationaliser une partie du secteur bancaire, car il savait à quel point c’est un secteur pas comme les autres. Las la droite est repassée par là et la Gauche, depuis, n’ose plus aborder cette question. C’est pourtant bien là, sans doute, que gît une des réponses à la crise morale et financière actuelle.

3 réflexions au sujet de « Crise monétaire ou crise morale ? »

  1. J’ai trop cotoyé de près M. Trichet pour savoir à quel point il fait preuve d’un rigidité à toute épreuve sur les questions monétaires. J’ai souvenir qu’il décrochait lui-même son téléphone pour passer des savons aux journalistes qui émettaient des points de vue différents des siens. Je constate que des années plus tard il n’a pas changé d’un iota…

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